Le philosophe, sociologue et écrivain Pierre Sansot, décrivait la gare comme nouvelle porte d'entrée dans la vie : « S'enfoncer dans une gare, c'est ouvrir, toutes grandes, les portes qui donnent sur la ville (…) Dans la gare, avant de partir, nous avons le sentiment de tourner le dos à toute la ville, encore présente. En effet, la gare est dehors et en dedans de la ville. Assez proches d'elle pour être assurés de son existence, assez distants pour la globaliser du dehors. » 1973, Poétique de la ville. J'ai pris pour la première fois le train sur l'un des quais de la gare de Tours. La gare est à l'image de la ville, à taille humaine. Petite, on s'y repère facilement. Les wagons pénètrent en son centre pour y marquer l'arrêt. Étant en cul-de-sac, la totalité des trains y font terminus. Avant de m'avancer sur la voie, je passais plusieurs minutes les yeux fixés sur le tableau d'affichage. Dans le jargon SNCF on l'appelait TGD, « Tableau Général Départ ». Le son du battement des palettes provoquait un arrêt dans le temps jusqu'à ce que ledit train s'affiche. Pendant ce cours laps de temps, on pouvait presque sentir la montée d'adrénaline, comme si l'on regardait en temps réel les variations de la Bourse, les résultats d'un match ou le tirage de la loterie. J'étais fière d'habiter dans l'une des dernières villes à posséder un objet pareil. Remplacé en 2015 par un écran, il a trouvé refuge à la Cité du Train à Mulhouse.